Bientôt l’autodafé ?

 

(c) Ishta

Le livre est un bien essentiel pour beaucoup. Mais le pouvoir a décidé le contraire. On y avait déjà pensé quand, dans le cadre de la pandémie Covid, il a été interdit de marcher dans la nature, d’entretenir les liens sociaux, de manifester puis de… danser. C’est au tour du livre d’être sur la sellette.

Nous le savons, les libraires ont dû fermer comme d’autres commerces depuis le « re-confinement » décidé par le président de la République le 28 octobre dernier.

Face à l’émoi suscité par cette mesure (plusieurs pétitions en ligne ont été lancées, notamment par les libraires et par le SNE, qui ont recueilli des dizaines de milliers de signatures), le gouvernement a ensuite décidé de fermer… les rayons livres des supermarchés.

Les libraires se démènent avec courage depuis deux semaines pour organiser le « clique & collecte » quand dans le même temps les bibliothèques/médiathèques proposent de nouveau un service de « réservation ».

Inutile de demander quel sera sans doute le grand gagnant de l’opération, j’ai nommé Amazon (« zone-zone »1), dont le PDG a déjà rencontré Emmanuel Macron en février dernier pour parler… « développement durable » ( !)2.

(c) Ishta

C’est le moment ou jamais de s’interroger sur ce qui se joue derrière tout ça, sous peine de risquer de le regretter amèrement un jour. Car pour nous, tout se résume à une question : pourquoi le livre a-t-il été classé comme un besoin « non essentiel » ?

Comme l’a expliqué Simon Blin dans son excellent papier « Qu’est-ce qu’un bien essentiel ? » publié le 6 novembre dernier dans Libération3, pouvoir consommer les produits « autorisés » en vente dans les supermarchés évacue de facto toute une forme de vie plus subjective, moins saisissable et pourtant tout aussi indispensable. Vitale. À ce titre, le livre est un bien essentiel pour beaucoup. Mais le pouvoir a décidé le contraire. On y avait déjà pensé quand, dans le cadre de la pandémie Covid, il a été interdit de marcher dans la nature, d’entretenir les liens sociaux, de manifester puis de… danser. C’est au tour du livre d’être sur la sellette. (Re-)lisons Klemperer4 pour nous réveiller avant qu’il ne soit trop tard : quelle sera la prochaine étape, l’autodafé ?

Flore Negroni, déléguée syndicale, pour la section CGT de Milan

Notes :

1 Copyright Frédéric Fromet /Par Jupiter/France Inter. Excellente chanson (et émission à l’avenant) pour réfléchir tout en se détendant les zygomatiques.

2 https://lanouvelletribune.info/2020/03/jeff-bezos-sa-viree-parisienne-qui-pourrait-faire-jaser/

3 https://www.liberation.fr/debats/2020/11/05/qu-est-ce-qu-un-besoin-essentiel_1804726

4 Victor Klemperer, LTI, la langue du IIIe Reich, trad., Pocket (collection Agora), 2003

PS : A Bagnolet (93), l'histoire (en images) de Rosalie, libraire, harcelé par la police.

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